La Dérive des Continents

1.1 - La Dérive des Continents


La dérive des continents est une théorie proposée au début du siècle par le physicien-météorologue Alfred Wegener, pour tenter d'expliquer, entre autres, la similitude dans le tracé des côtes de part et d'autre de l'Atlantique, une observation qui en avait intrigué d'autres avant lui.

 L'avant Wegener

Wegener était un scientifique de son siècle, possédant une large gamme de connaissances en géologie, géophysique, astronomie et météorologie.

 Wegener l'homme

Il possédait, en outre, le courage, la fièvre de connaître, l'indépendance, la rigueur intellectuelle, la logique et une bonne dose d'intuition. Armé de tout ce bagage, il a pu formuler une hypothèse sur le déplacement des continents. Il avait observé la complémentarité des lignes cotières entre l'Amérique du Sud et l'Afrique; il y conçut l'idée qu'autrefois l'Afrique et l'Amérique n'avaient été qu'un seul et même bloc qui se serait fragmenté en deux parties lesquelles se seraient ensuite éloignées l'une de l'autre. C'est la théorie de la dérive des continents.

Wegener avançait des "preuves" pour appuyer sa théorie. Il serait plus juste de dire qu'il apportait des faits d'observation qui pouvaient être expliqués par une dérive des continents.

1. Le parallélisme des côtes de l'Atlantique.

On observe en effet un certain parallélisme des lignes côtières entre d'une part les Amériques et d'autre part l'Europe - Afrique.

Cela suggère que ces deux ensembles constituaient deux morceaux d'un même bloc.

Ce qui amena Wegener à concevoir que dans un passé lointain toutes les masses continentales étaient réunies en un seul mégacontinent, la Pangée. Aujourd'hui, grâce à notre connaissance de la tectonique des plaques, on utilise une reconstitution plus juste de cette Pangée, celle de Bullard et coll.

2. La répartition de certains fossiles.

On retrouve, de part et d'autre de l'Atlantique, sur les continents actuels, les fossiles de plantes et d'animaux terrestres datant de 240 à 260 Ma.

Comment des organismes terrestres n'ayant pas la capacité de traverser un si large océan ont-ils pu coloniser des aires continentales si éloignées les unes des autres?. La réponse de Wegener est simple: autrefois, tous ces continents n'en formaient qu'un seul, la Pangée, présentant ainsi des aires de répartition cohérentes.

A noter qu'on a utilisé ici la reconstitution de Bullard et coll.

3. Les traces d'anciennes glaciations.

On observe, sur certaines portions des continents actuels, des marques de glaciation datant d'il y a 250 millions d'années, indiquant que ces portions de continents ont été recouvertes par une calotte glaciaire. Il est plus qu'improbable qu'il ait pu y avoir glaciation sur des continents se trouvant dans la zone tropicale (sud de l'Afrique, Inde). De plus, il est anormal que l'écoulement des glaces, dont le sens est indiqué par les flèches, se fasse vers l'intérieur d'un continent (des points bas vers les points hauts; cas de l'Amérique du Sud, de l'Afrique, de l'Inde et l'Australie). Cette répartition actuelle des zones glaciées n'est donc pas cohérente.

Le rassemblement des masses continentales à la Wegener donne un sens à la répartition de dépôts glaciaires datant d'il y a 250 Ma, ainsi qu'aux directions d'écoulement de la glace, relevées sur plusieurs portions de continents. La répartition sur la Pangée montre que le pôle Sud était recouvert d'une calotte glaciaire et que l'écoulement de la glace se faisait en périphérie de la calotte, comme il se doit.

4. La correspondance des structures géologiques.

Cela n'est pas tout que les pièces d'un puzzle s'emboîtent bien, encore faut-il obtenir une image cohérente. Dans le cas du puzzle des continents, non seulement y a-t-il une concordance entre les côtes, mais il y a aussi une concordance entre les structures géologiques à l'intérieur des continents, un argument lourd en faveur de l'existence du mégacontinent Pangée.

La correspondance des structures géologiques entre l'Afrique et l'Amérique du Sud appuie l'argument de Wegener. La carte ci-dessous montre la répartition des blocs continentaux (boucliers) plus vieux que 2 Ga (milliards d'années)selon la géographique actuelle.

Autour de ces boucliers, les chaînes de montagnes plus récentes ont des âges allant de 450 à 650 Ma. Les traits indiquent le "grain" tectonique de ces chaînes. À remarquer, dans les régions de São Luis et de Salvador au Brésil, la présence de petits morceaux de boucliers.

Le rapprochement des deux continents (carte ci-dessous) montre qu'en fait les deux petits morceaux des zones de São Luis et de Salvador se rattachent respectivement aux boucliers ouest-africain et angolais, et qu'il y a aussi une certaine continuité dans le grain tectonique des chaînes plus récentes qui viennent se mouler sur les boucliers. L'image du puzzle est cohérente.

La correspondance des structures géologiques entre l'Amérique du Nord et l'Europe confirme aussi l'idée de Wegener. Les trois chaînes de montagnes, Appalaches (Est de l'Amérique du Nord), Mauritanides (nord-est de l'Afrique) et Calédonides (Iles Britanniques, Scandinavie), aujourd'hui séparées par l'Océan Atlantique, ne forment qu'une seule chaîne continue si on rapproche les continents à la manière de Wegener. Les géologues savent depuis longtemps qu'effectivement ces trois chaînes ont des structures géologiques identiques et qu'elles se sont formées en même temps entre 470 et 350 Ma.


Le géophysicien Wegener était bien au fait que la croûte continentale était plus épaisse sous les chaînes de montagnes que sous les plaines, et que cette situation répondait au principe de l'isostasie qui veut qu'il y ait un équilibre entre les divers compartiments de l'écorce terrestre dû aux différences de densité. Il en conçut l'idée que les continents "flottaient" sur un médium mal défini et qu'ainsi ils pouvaient dériver les uns par rapport aux autres.

Auriez-vous été convaincu par les arguments de Wegener qu'un jour un grand bloc continental s'est fragmenté et que ses parties ont dérivé les unes par rapport aux autres? Les contemporains de Wegener n'ont pas été convaincus de cette proposition révolutionnaire de la dérive des continents; l'opposition fut vive. En fait, Wegener a démontré de façon assez convaincante, qu'un jour, les continents actuels ne formaient qu'un seul mégacontinent, mais il ne démontrait pas que ceux-ci avaient dérivé lentement depuis les derniers 250 Ma. À la limite, on pourrait tout aussi bien invoquer certains scénarios des catastrophistes pour expliquer les constatations de Wegener. Le problème majeur, c'est qu'il ne proposait aucun mécanisme pour expliquer la dérive. Il démontrait bien que la répartition actuelle de certains fossiles, de traces d'anciennes glaciations ou de certaines structures géologiques soulevaient des questions importantes auxquelles il fallait trouver des explications. Mais ces constatations ne sont pas suffisantes pour démontrer que les continents ont dérivé. Notons, qu'à l'inverse, si les continents ont dérivé, il est nécessaire qu'il y ait un appariement entre les structures géologiques et la répartition des fossiles.

Il faut signaler que l'hypothèse de Wegener était une hypothèse génératrice de science, parce que les questions soulevées sont suffisamment sérieuses et fondées sur des faits réels pour qu'on s'attaque à y répondre. Mais il aura fallu attendre plus de quarante ans pour que les idées de Wegener refassent surface et qu'on se mette à la recherche du mécanisme de dérive qui lui manquait. Entre autres, il avait manqué à Wegener les données fondamentales sur la structure interne de la Terre.

La structure interne de la Terre


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