Le sel des îles-de-la-Madeleine

Le sel des îles-de-la-Madeleine


Aux îles-de-la-Madeleine, un petit archipel québécois se situant à mi-chemin entre Terreneuve et l'île-du-Prince-édouard dans le Golfe St-Laurent, on exploite une mine de sel, la Mine Seleine. Il s'agit d'un des nombreux diapirs de sel d'âge Carbonifère qu'on retrouve dans ce que les géologues appellent le Bassin géologique de Madeleine.

Cette carte, extraite de H.W. Van de Poll (1995, Upper Paleozoic rocks: New Brunswick, Prince Edward Island and îles-de-la-Madeleine. Commission géologique du Canada, Géologie du Canada, no 6, p. 455-492), montre la position de ce bassin géologique (en rouge) dans le Golfe St-Laurent. Les îles-de-la-Madeleine, non indiquées sur cette carte, se situent juste à l'ouest de la ligne G-H, dans la partie nord du bassin. Les nombreuses taches noires sont des diapirs de sels (on dit aussi des dômes de sel).

La coupe géologique le long de la ligne G-H, extraite du même ouvrage que la carte, montre les nombreux diapirs de sel du Bassin de Madeleine (ci-dessous). Remarquez l'échelle du phénomène; la hauteur de ces grands diapirs se mesure en milliers de mètres!

Tout ce sel s'est formé dans d'immenses lagons d'évaporation sous un climat chaud et sec, comme on vient de le voir pour la formation des évaporites à la page sur l'origine des minéraux. Il faut savoir qu'au Carbonifère la portion de croûte terrestre correspondant aux îles-de-la-Madeleine se trouvait pratiquement à l'équateur (planisphère ci-dessous; pour plus de détails sur la paléogéographie, voir à la section 4.2.2). La position des îles-de-la-Madeleine est pointée par la flèche blanche. Ces lagons étaient alimentés en eau salines par un long bras de mer qui se situait entre les continents Laurentia et Gondwana.

Mais pourquoi ce sel se retrouve-t-il aujourd'hui dans des diapirs?

Les quatre schémas qui suivent expliquent comment se forme un diapir salifère. Prenons le cas où il s'est formé un épais dépôt de sel, comme aux îles-de-la-Madeleine durant le Carbonifère. On parle ici de dépôts atteignant plusieurs centaines de mètres d'épaisseur (schéma A, ci-dessous). Subséquemment, il se déposera sur cette couche de sel d'autres sédiments (sables, boues, graviers). La densité du sel est de 2,16, tandis que celle du sédiment, non encore compacté et gorgé d'eau, sera inférieure à celle du sel.

Avec le temps, les sédiments s'empileront et formeront une couche de plus en plus épaisse au-dessus du sel (schéma B). Ils se compacteront et se transformeront progressivement en roche sédimentaire; leur densité augmentera de ce fait.

Lorsque la couche de roches recouvrant le sel aura atteint une épaisseur de 450 à 600 mètres, la densité des roches au-dessus du sel sera égale à celle du sel. Tant que l'on a du moins dense sur du plus dense, ou des masses de densité égale, l'ensemble des masses sera en équilibre.

Quand la couche rocheuse aura atteint les quelques milliers de mètres, la compaction aura fait augmenter sa densité qui sera de l'ordre de 2,7, bien supérieure donc à celle du sel (schéma C). Il y aura alors un sérieux déséquilibre entre les masses de sel et de roches sédimentaires, car on aura du plus dense sur du moins dense. Le sel commencera à fluer vers le haut pour rééquilibrer les densités.

C'est ainsi que le sel s'injectera dans la couverture sédimentaire sous forme de grands diapirs.

La carte et la coupe A-B qui suivent, extraites d'une publication de la SOQUEM, présentent la situation des diapirs de sel sur la plate-forme des îles-de-la-Madeleine.

Les évaporites du Groupe de Windsor, en bleu azur sur cette coupe A-B, ont été remobilisées en diapirs. Trois grands diapirs on été repérés aux îles-de-la-Madeleine. La mine de sel Seleine, présentement en exploitation, se situe dans le diapir le plus septentrional.